Salute

Ce matin, je suis dans le métro, je bouquine et je suis complètement absorbé par ma lecture.

Deux ados, 25 ans à eux deux au maximum se font entendre bruyamment.
Ils sont avec un matériel dernier cri bricolé sur une caddy sans le sac, juste une batterie, un ampli, un haut-parleur et un lecteur CD ou mp3 je ne sais.

Mais çà donne à donf!

Un tube d’il y a un an ou deux je ne sais plus, de ce groupe venu de Bucarest, repris moult fois, « Salute ».

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Et de virevolter, se déhancher à la façon décrite dans le bouquin que je lis. C’est tout frais, tiens, je te reprends les mots pour mots « C’est le mouvement sec de ses hanches quand il tient à attirer les regards » (Un garçon d’Italie)

Je les regarde, je suis sorti de mon livre pour y entrer !

Trois italiens volubiles tiennent conversation devant moi, je les retrouverai plus tard dans mon terminal. Ce ne sont pas de vrais italiens, leurs chaussures sont « grunge ». L’un a des nu-pied façon scandinave, mais vu la température, il a mis des chaussettes que les moines de la Chartreuse mettent en hiver, un tricot de laine bicolore pour aller jusqu’en laponie, l’autre a mis des sketba qu’il a visiblement acheté dans un état fort usagé dans une friperie de la rue St Honoré, et le dernier, a mis des chaussures de sport automobile qui n’ont pas du voir l’ombre d’un entretien depuis l’achat premier.
Enfin, côté débit, ce sont bien des italiens, va comprendre!

Nan, j’invente rien, je replonge dans mon livre, une étincelle au fond des yeux.

Nuit bleue mauve

C’était il y a…c’était hier à peine!

Une feuille de teinte bleue mauve, une de ces feuilles qui vous font penser à des mots doux, pas un billet ordinaire, non, une feuille précieuse, un peu comme un parchemin d’autrefois.

Une écriture de plein et de délié, une écriture bleue coure sur la feuille, de haut en bas. La calligraphie est assurée, rapide, un zeste suave avec ses courbes et ses arrondies.

Le ton est enjoué, volontiers caressant, comme une invitation à une danse, une valse peut-être, un danse à deux, certainement.

Le ton est tourbillon vestige d’un ârome nocturne, et l’écriture empreinte des ébats de la nuit se rappelle, tout comme la peau et les sens se souviennent, même longtemps après.

La feuille au ton bleu mauve est posée là, sur ton écritoire, jouant avec les premiers rayons du soleil levant.

Un frisson juste là, une feuille bleue mauve contient un trésor.

Une signature gourmande tout en bas,

Serait-ce possible alors!

Je t’aime

Edgar Will
(ou Edward Will, toi seule le sait)

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Crédit: Deborah Chock / Ecriture

Post-it sensation

Je suis allé chez mon coiffeur.

Je ne sais pas si çà vous fait çà, mais moi, j’ai toujours l’impression d’y être allé il y a à peine un mois !

Et là, mon coiffeur pianote sur son Coifmatic et me dit, « Hem! çà fait plus de deux mois qu’on ne s’était pas vu! »

Je le regarde étonné… Deux mois, heureusement que tu m’as rappelé d’y passer…

Mon coiffeur a étoffé son équipe, c’est une jeune fille de 20 ans à peine, son CAP coiffure tout frais en poche, fière derrière son look branché de pouvoir désormais coiffer la clientèle sans remarques d’un maître coiffeur en chaperon.

La fierté se lit dans son regard, elle a vraiment du chien.

Je passe au bac, et elle me fait mon shampoing (nan, mes cheveux sont propres, mais je ne sais pas pourquoi, le coiffeur s’obstine toujours à me les laver, un genre de rite, un passage obligé que j’adopte sans même rechigner, docilement).

Elle me fait « la température, çà va? »

çà aussi, çà fait partie du rite. Alors que tous les équipements de salle de bain sont proposés désormais avec moult mitigeurs, tous plus design et hi-tech les uns que les autres, et bien ton coiffeur, il te règle la température « manuellement ». A mon avis, c’est juste pour que le client se sente important, un truc marketing en somme.

Pour le shampoing, il y a mille touchers. Du toucher un peu lymphatique à celui très énergique, tout existe, un peu comme les poignées de main. Tout tout tout, vous saurez tout sur le toucher, le fuyant, le faux-fuyant, l’affiché, le doux, le professionnel, le nonchalant, le  » ‘suis ailleurs », le vrai, le sensuel, le frotteur, le décapeur, le maniaque, le lent, le court, le long, tout, tout…

Aujourd’hui, le mien est professionnel et attentif. Je me fais la remarque à moi-même, que la même jeune fille me passant la main dans les cheveux dans n’importe quelles autres circonstances prêterait à discourir 😉

Comme si j’avais une chevelure de Robinson de plus de 6 mois de vie sauvage, elle s’applique à me faire non pas un mes deux shampoings !!! Pourtant, je me fais un shampoing très régulièrement, je t’assure!

Et puis là, au milieu du second, les doigts se font plus lents, presque sensuels, ils s’éparpillent tout autour de ma boîte cranienne, j’ai l’impression d’être une île que l’on découvre.

Et puis deux à deux, symétriquement, les doigts effectuent des massages circulaires, des pressions suivies de relâchements, d’un coup je ne pense plus à rien (j’ai dit à rien !), deux doigts qui s’égarent sur mes tempes, puis par paires, papillonent autour de mon cuir chevelu, un sentiment de bien-être !

Mince, c’est fini, je commençais à y prendre goût, une douce sensation!

PS: Fais moi penser à ne pas attendre deux mois !!!

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Boétie

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Boétie,

Première brume de l’année ! Oui, le brouillard se fait tardif. Habituellement, il suit l’arrivée officielle de l’automne, et dès fin Septembre, il peuple les matins, simple témoin du changement de saison, transition entre un été et un hiver, un passage.

6h du mat, Il fait tard, il fait brouillard.

Cette année le brouillard s’est annoncé un 27 Octobre, comme un retardataire, le brouillard avait l’humeur des vendanges tardives. Il se faisait attendre pour prendre un peu plus de sucre, de suavité.

6h du mat, Il fait tard, il fait brouillard.

Ce brouillard tardif a un air de sorcière des collines, il vous plonge dans un monde inattendu, d’un monde qu’on n’attend plus et qui surgit sans qu’on y prenne gare, non pas par surprise, mais par étonnement. Les yeux écarquillés pour mieux voir, une danse du matin s’exécute, improvisée, des gouttelettes de partout, et au passage du portail, un fil, un immense fil tendu par je ne sais quelle araignée de la nuit ou quel funambule, un fil s’écrase à la hauteur de mon nez, je n’avait rien vu, les yeux grands ouverts, c’est sûr , il y a comme une magie ensorcelante dans cette danse matinale.

6h du mat, Il fait tard, il fait brouillard.

Mon taxi driver est philosophe, c’est le propre du taxi driver du matin, bien mieux que celui du soir. Le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt, et la philosophie se conjugue avec chauffeur de taxi du matin.
Il me dit: « Il fait un de ces brouillards ce matin ! »
« Oui, çà doit être l’un des premiers de l’année »
Il rétorque aussitôt: « Mais c’est le premier! »
Et de disserter sur les ennuis de cette saison qui plonge les mains dans la suie, euh! Non, les matins dans la nuit, j’avais mal compris, tu comprends, avec ce brouillard!

6h du mat, Il fait tard, il fait brouillard.

J’aime ces matins de brouillard, avec leur cohorte de senteurs cachées, leur érotisme torride ruisselant de sensualité. C’est un peu comme après une douche trop longue et trop chaude, l’atmosphère est suspendue comme dans un sauna ou un hammam. (Hammam tu dis, faudra que tu m’emmènes, je ne connais pas). Le matin dans la brume est subtil comme une femme à la sortie du bain. Mille gouttelettes s’écrasent sur mon visage, je regarde à côté de moi, mon chauffeur de taxi est moustachu! Alors je ferme les yeux et me laisse entraîner dans un matin de brume…

6h du mat, Il fait tard, il fait brouillard.

Il va faire beau!

PS: Je m’étais trompé, la brume s’est levée à moitié ( dis, l’accord avec des verbes pronominaux, je ne sais plus trop, faudrait un Bled, avec le temps…, mais je crois que j’ai bon, suis assez intuitif en la matière), la brume s’est levée à moitié, comme un rideau qui se bloque, comme une persienne entrouverte. Cela donne une luminosité inédite, genre « sex and the city », du sol jusqu’à la cime des arbres, un focus impeccable ou presque,et au-dessus, un halo façon (mince comment c’est déjà, les photos de charme post-adolescence, avec des flous artistiques, un nom anglais qui finit en « on »), bref un halo qui donne un air artificiel. (Bon, ben je crois que t’as vraiment jamais regardé « sex and the city » toa!)