Le Lirou grignoteur de souvenirs bleus

C’était un dimanche matin du mois de Juin, il faisait déjà chaud.

Dans la maison natale, je vais exhumer quelques souvenirs secrets abrités sagement dans une boite en carton, genre carton de déménagement, étiquetée à mon prénom. Je prends le carton aussitôt, et presque fébrilement, je défais la bande adhésive qui offre peu de résistance, et j’ouvre les volets de la boîte en carton dans un nuage de poussière!!!

L’oeil avide, je jette un oeil (vi, ben comment tu veux dire!), je jette un oeil et je me recule tout aussitôt, médusé! Un animal squatte mon carton, douillettement installé dans un nid de confetis produits sur place. C’est un loir ou un lérot! Finalement, aussi surpris que moi, passé la phase d’éblouissement du jour ensoleillé, il ne demande pas son reste et file hors de ma boite!

La première chose que je vois, c’est mon carnet de tables logarithmiques jaune, un souvenir de seconde rendu complètement inutile avec l’ère des calculatrices (Vi, je sais, t’as pas connu cette époque sans calculatrice avec règle à calcul et tables de logarithmes, moi à peine, puisque la même année la calculatrice était promue au rang d’outil pédagogique acceptable et que la règle à calcul et le carnet de tables n’auront servi que le temps d’un tp).

Tout d’abord je souris, je suis amusé, cet animal inoffensif, réputé gros dormeur, surtout l’hiver, squattant ma boite de souvenirs entassés confère à la situation un air cocasse.

Et puis je commence le travail d’archéologie, prenant un à un les reliques du festin du diable d’animal… Et peuchère, çà fait des années qu’il squatte l’hôtel abandonné le coquin. Ce n’est pas un nid de confetis, mais carrément une usine à confetis! Et çà ne me fait plus rire du tout. Il y a là, entassés, des milliers de souvenirs d’enfance et d’adolescence réunis qui, avant l’ouverture, faisait naître une excitation certaine à retrouver ces odeurs oubliées, et puis maintenant, une amertume non dissimulée!
Je dépose alentour du carton, sous un soleil éclatant les lambeaux que le gredin a bien voulu laisser. Ma petite boite à secret que j’avais recouverte d’un papier décoré (un décor qui me fait sourire, enfin, qui me fait sourire jaune quand je vois les dégâts que le lirou a occasionné!)
Vu les momies que j’ai retrouvées dans ce carton, cela doit faire plus de dix ans que mon carton a été colonisé…

J’étale, j’étale, je feuillette, et je suis abattu, dans un état d’hébétude inhabité, comme si celui qui regardait l’état du désastre n’était pas moi. Je ne réalise pas vraiment, je viens de perdre des milliers de souvenirs en quelques secondes, passant d’un état d’HyperNeuroMemoTruc à celui d’abattement sans motif.

Je suis là sans être là, seul le soleil qui monte me rappelle que la vie continue et mon cerveau fait des confetis, d’où l’expression bien connue, broyer du papier.

Je suis resté vide jusqu’au soir.lirou